Carrés de couleur

[Portrait d'Ignace de Loyola]

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Une image gravée d’Ignace de Loyola est conservée dans un album comprenant une série de reproductions d’art d’origines variées. Elle porte comme unique légende « Ignatius Loyola ». Aucune précision quant à l’auteur et à sa date de réalisation. Le personnage représenté sous forme de buste, est disposé dans un cadre rectangulaire, barbu, portant un habit à motif, tourné vers la droite. Par sa composition, la gravure semble datée de la seconde moitié du XVIIIe ou du XIXe siècle. Le Rijksmuseum d’Amsterdam et le British Museum de Londres possèdent exactement la même reproduction. Le premier l’attribue au graveur vénitien, Giovanni Marco Pitteri, le second, avec prudence, « d’après Marco Pitteri, produite entre 1750 et 1830 environ ».

En fait, ce portrait reprend une image plus ancienne gravée par Marco Pitteri dont un exemplaire est notamment conservé au British Museum. Cependant celle-ci présente quelques différences avec la première représentation : le buste d’Ignace est un peu plus grand, laissant entrevoir davantage l’ouverture de son manteau ; on distingue une auréole pleine, signe de la sainteté du personnage, derrière la tête ; une légende rédigée en latin accompagne l’image : « S. Ignatii Loiolae soc : Iesu fund.is effigies ex typo gypseo qui apud pp.es ejusdem soc. Patavii asservatur ex dono p.o.m. [= pontifici optimi maximi] Clementis XIII ». En dessous, à gauche, le nom de l’artiste : « Marcus Pitteri fec. et inc. Venis». Cette mention nous apprend que l’effigie d’Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus, est l’œuvre de Marco Pitteri, graveur vénitien, réalisée à partir d’un buste en plâtre. Celui-ci est en possession des jésuites de Padoue qui l’ont reçu de Clément XIII, pape de 1758 à 1769. Très certainement, il a été réalisé sur base du masque mortuaire d’Ignace de Loyola conservé à Rome. Quant à l’effigies, Pitteri l’a gravée entre 1758 et 1773 (suppression de la Compagnie de Jésus à Padoue).

Marco [Alvise] ou Giovanni Marco Pitteri, figure marquante de l’histoire de la gravure vénitienne, est né à Venise en 1702 et y meurt en 1786. Il recourt à des portraits peints ou sculptés pour composer ses œuvres et traduit avec virtuosité le clair-obscur en une structure inimitable de lignes et de points gravés, réalisant des portraits densément incisés. Ses sujets sont variés : personnages de l’Antiquité, de la Bible, saints ou contemporains. Il a été l’élève du peintre Gian Battista Piazzetta (1682-1754) pour qui il exécute environ 140 œuvres, et du graveur Giuseppe Baroni (+1730).

Le portrait gravé conservé dans le fonds du Museum Artium à Namur, gomme tant le nom de l’auteur que la sainteté d’Ignace de Loyola. Pas surprenant qu’il ait été repris, en 1936, comme page de couverture de la traduction française du livre de Ludwig Marcuse, Ignace de Loyola 1491-1556 dont le sous-titre le dictateur des âmes révèle le parti pris de son auteur.


Michel Hermans s.j.

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