Carrés de couleur

Fortunius Licetus De monstris. Ex recensione Gerardi Blasii, M.D. & P.P Qui monstra quaedam nova & rariora ex recentiorum scriptis addidit

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Fortunio Liceti est né en 1577 à Rapallo dans la république de Gênes et est mort en 1657 à Padoue. Philosophe, médecin, universitaire et savant, il s’intéresse à la vie sous toutes ses formes. Ses différents ouvrages traitent de l’origine de la vie, des malformations chez les animaux et les humains mais également de l’âme des animaux ou de la luminosité de la lune.

Liceti définit les monstres comme « ce qui naît, entre les animaux, avec une disposition et un arrangement de membres tout différent et tout contraire à la nature de ceux qui les ont engendrés ». Il recherche dans les monstres la détermination de la cause qui a perturbé la formation naturelle des êtres vivants. Il associe régulièrement l’art et la nature pour définir l’origine des monstres : « de l’art qui imite les défauts de la Nature, à quoi même cette dernière contribue ».

Ce livre est rédigé en latin. Voici une traduction de l’introduction qui explique son point de vue sur les monstres :

« Ayant donc à parler de la génération des monstres en particulier, voyons premièrement de combien de sortes il y en a, et quelle est leur commune Origine, et leur Cause. Sur quoi nous croyons qu’on en peut fort bien concevoir trois sortes de productions. La première surnaturelle, que Dieu permet et procure, pour punir les hommes des péchés et des crimes qu’ils ont commis, comme la S. Écriture nous apprend qu’il est arrivé à Nabuchodonosor. La seconde au-dessous de la nature, lorsque le diable fait illusion aux sens des hommes, comme cela se voit en ceux qui sont transformés en d’autres par Sorcellerie. Et la troisième est purement naturelle, et vient de quelque défaut, ou de quelque empêchement, qui se trouve dans les principes qui sont naturellement destinés à former les corps des hommes. Nous n’entreprendrons pas d’examiner ici l’Origine miraculeuse des Monstres, ni celle que le diable procure par ses illusions. Nous parlerons seulement que de la naturelle. »

Un chapitre est néanmoins consacré aux œuvres du diable par l’influence qu’il peut avoir sur la nature en créant une illusion : « la cause de ce monstre, à proprement parler, est à la vérité naturelle : mais le diable en est le ministre et l’artisan. »

(Traduction : La nature et les prodiges : L’insolite au XVIe siècle, Jean Céard).

Si beaucoup de représentations de ce livre sortent probablement de l’imagination des hommes (hybrides hommes-animaux), certains syndromes élucidés au XXe siècle y sont représentés. Page 135, on retrouve très probablement un enfant avec une trisomie 13 caractérisée par une cyclopie et un proboscis (structure tubulaire au milieu du visage).

Page 158, sont représentés différents hommes avec une pilosité abondante et une répartition particulière typique d’une mosaïque où une mutation génétique est apparue après la fécondation, ce qui explique que seulement une partie du corps soit affectée. De nombreuses illustrations sont consacrées à la description, parfois très détaillée, des jumeaux siamois (jumeaux reliés par une partie du corps). Ce phénomène est causé par une séparation incomplète de jumeaux monozygotes (vrais jumeaux) lors de la séparation de l’embryon commun.

Cet ouvrage n’est pas le premier à traiter des malformations mais il est un des plus influents et il a suscité l’intérêt pour les « monstruosités » à la Renaissance. Si ce livre est surtout connu pour ses représentations, c’est également une réflexion sur l’origine des anomalies de la nature.


Damien Lederer

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