Carrés de couleur

Le Père Théodore de Theux de la Compagnie de Jésus et la mission Belge du Missouri

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Aîné de famille, le Père Théodore était le frère du Ministre Barthélémy de Theux. Le commentaire du Recteur de son Séminaire précisait déjà que : « Le génie, l’application, la sagesse, la conduite, tout va en lui d’un pas égal ». Séduit par l’œuvre des missionnaires Jésuites au Nouveau-Monde, il décide de tout abandonner et de partir y prêcher le règne de Dieu. Il prend donc à Liège, le 12 avril 1816, la diligence pour Anvers, laissant une lettre d’adieu à ses chers parents. Pour les rassurer, il leur écrit encore de cette ville où il a fallu attendre longtemps des vents favorables pour descendre l’Escaut, que : « La saison est on ne peut plus à l’abri des naufrages ».

Depuis le rétablissement de l’Ordre en 1814, les Jésuites avaient incroyablement prospéré sur la côte Est et leur zèle parvenait même à ramener à la vraie Foi nombre de protestants qui se rendaient à leurs instructions. Après son noviciat et, en 1818, ses premiers vœux, le Père Théodore devient en 1822 citoyen américain, chose qu’il commente ainsi dans une lettre : « Ce nom jadis odieux en Europe, ne l’est point ici, on le regarde comme un titre d’honneur ».

En 1825, ce fut le départ pour l’Ouest, où les « Robes noires » n’étaient encore que huit, pour l’immense étendue du Missouri et de l’Illinois. Qu’importe : les Apôtres n’étaient que douze, lorsqu’ils entreprirent la conversion de l’Univers. Parmi eux se trouvait le Père Pierre-Jean De Smet (1801-1873), le futur apôtre des Indiens des Montagnes Rocheuses, qui fut l’élève et le fils spirituel du Père de Theux.

C’est ici que s’inscrit la fondation du Collège Saint Louis, appelé à devenir dès 1832 l’Université catholique de Saint-Louis. Aux côtés du Père Joseph Verhaegen 1, le Père de Theux est à l’origine de cet établissement et en devint le Président. Il s’agit véritablement d’une œuvre fondée uniquement par l’initiative privée, sans aucun soutien du Gouvernement. L’aide financière constante de familles de Belgique y avait été pour beaucoup.

Nommé en 1833 Supérieur de la mission du Missouri, qui était essentiellement belge, le Père Théodore se plaint des Blancs « … cent fois pires que ces pauvres sauvages, dont le Gouvernement achète les terres et qu’il oblige ensuite, en vertu de ce contrat, à aller se fixer ailleurs ».

Déchargé trois ans plus tard de cette mission, le Père Théodore se lança dans l’évangélisation des Indiens. Plus à l’Ouest se trouvait la redoutable tribu des Kickapoes. Le cas de deux enfants malades, miraculeusement guéris après que le Père les eut baptisés, fit demander à beaucoup « l’excellente médecine des Robes noires ».

Les missions continuant à prospérer, le Père de Theux fut envoyé en Louisiane, puis à Cincinnati. Partout son départ suscitait des pleurs. Il n’en restait pas moins très attaché à sa famille et à sa patrie d’origine, écrivant à son frère Barthélémy : « Continuez de même, cher ami, à agir par vous-même et par d’autres, et cela de toutes vos forces, pour le bien-être du Royaume. Soyez le soutien de notre Roi, je suis enchanté de ce que vous dites de sa prudence et de son talent pour calmer les passions ».

Comme il ne se remettait pas d’une pleurésie, le Père eut trois semaines d’une très pénible maladie. Le 26 février 1846, ayant interrogé sans crainte le docteur, ce dernier lui annonça qu’il mourrait le lendemain. « Non, docteur, je ne mourrai pas demain. Samedi sera le jour ». C’était, en effet, une fête de la Sainte Vierge, à laquelle il avait toujours voué une grande dévotion. Ainsi advint.


Reynald Moretus Plantin


1 Cousin de Théodore Verhaegen, le fondateur de l’Université Libre de Bruxelles.

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