Carrés de couleur

Roma antica e moderna, o sia, Nuova descrizione di tutti gl' edifizj antichi, e moderni sagri, e profani della città di Roma ... con duecento e più figure in rame ...

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Œuvre anonyme, la Roma antica e moderna est un guide touristique systématique de la Città eterna et, en tant que tel, s’insère dans une longue tradition qui remonte aux VI-VIIe siècles pour les premières listes de catacombes à visiter lors d’un pèlerinage, et au VIIIe siècle pour le premier véritable guide qui propose des parcours (l’Itinerarium Einsidlense). À partir du XIIeMira- bilia Urbis Rome ouvrent une nouvelle ère avec de louables efforts – pas toujours corrects cependant –, d’identification des restes antiques ; au même moment apparaissent des éléments narratifs (mais toujours légendaires). A l’époque de l’humanisme, des œuvres érudites et foisonnantes de renseignements sur les monuments de l’Antiquité font leur apparition pour guider les visiteurs, tandis que des œuvres rédigées dans la veine des Mirabilia continuent à circuler. En principe – et cela vaut aussi pour les guides touristiques modernes –, il y a trois structures possibles pour un ouvrage de ce genre : on propose un parcours, on décrit un quartier d’une façon presque topographique ou l’on organise le guide à partir de certains thèmes. Ainsi, la Topographia Urbis Romae de Boissard est-elle structurée sur la base de trajets ou de routes. Par contre, la Roma antica e moderna a adopté un autre principe et a préféré la description par quartier. Si l’ouvrage de Boissard ne mentionne que les monuments de l’Antiquité, la Roma antica e moderna, comme son titre l’indique déjà, traite aussi des églises, palais et œuvres d’art « modernes ». Boissard utilise les bâtiments modernes uniquement pour suggérer l’endroit où il situe les restes classiques, alors que la Roma antica e moderna décrit tout. Pour l’organisation des quartiers, le guide anonyme suit la division officielle de Rome en « rioni » : ainsi, traite-t-il notamment des « rioni Colonna, Pigna et S. Eustachio » qui se trouvent tous dans ce qu’on appelle le « centro storico », le centre de la ville médiévale et de la Renaissance et qui constitue l’« abitato », la zone peuplée, en opposition au « disabitato », la zone sans habitant, qui occupe tout le secteur entre l’« abitato » et les murs d’Aurélien du IIIe siècle. C’est dans cette dernière partie que se trouvent toujours – à l’exception du Panthéon – les vestiges les plus importants de la Rome antique. Ceci explique pourquoi le second volume de la Roma antica e moderna parle moins des traces de l’Antiquité que ce que l’on aurait pu croire. En revanche, l’auteur consacre deux pages (p. 188-189) à une église qui, dans la plupart des guides actuels, n’est pas du tout mentionnée : Saint-Julien-des-Flamands (San Giuliano dei Fiamminghi) dans la Via del Sudario. Dans le chapitre « Di S. Giuliano a’ Cesarini e dello Spedale de’Fiamminghi », il mentionne (p. 189) : « Vien governato dalla Compagnia Nazionale, ed è instituito propriamente per i Popoli de’Paesi Valloni, e della sola Provincia della Fiandra » (« Cet hôpital – lié à l’église – est gouverné par la confrérie nationale et a été fondé pour les peuples des provinces wallonnes et de la seule province de Flandre »). En effet, cette église annexe de l’hôpital était, à l’origine (XIVe ou XVe siècle), destinée aux habitants du comté de Flandre (néerlandophone ou francophone) ; au XVIe siècle, la confrérie était toutefois très certainement ouverte également aux ressortissants de l’archevêché de Cambrai, qui couvrait une bonne partie de la Wallonie actuelle. Les Brabançons (excepté ceux du Pays roman, qui relevaient de Cambrai) et les Liégeois, quant à eux, se retrouvaient dans la Santa Maria dell’Anima, église nationale du Saint-Empire. Autre élément qui lie le présent ouvrage aux guides modernes : la présence de reconstructions de certains bâtiments. Ainsi, on voit à la page 46 le Panthéon tel qu’il se présentait au XVIIIe siècle avec les deux tours d’angle du Bernin (enlevées depuis), tandis que la page 48 montre le Panthéon « dans sa forme originale ». Que ces reconstructions soient fantaisistes (ne fût-ce que pour le manque de fouilles et de topographie « correcte ») est particulièrement évident dans la grande vue sur le Capitole dans l’Antiquité. En fait, cette représentation correspond plutôt à la réputation de cette colline où se trouvait la citadelle de la Rome antique et le temple le plus important, celui de « Jupiter Optimus Maximus », qu’à la réalité, antique ou moderne. Il va de soi qu’un grand nombre de ces illustrations emprunte aux prédécesseurs de cette Roma antica e moderna et que, par là, le matériel d’illustration donne une impression un peu disparate. Cette édition en trois volumes est dédiée au cardinal Alessandro Albani (1692-1779), collectionneur d’antiquités et protecteur de J. J. Winckelmann.

Michiel Verweij



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