Carrés de couleur

Imago primi saeculi Societatis Iesu a Provincia Flandro-Belgica eiusdem Societatis repraesentata

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L’Imago primi saeculi est réalisé à l’occasion du premier centenaire de la Compagnie de Jésus en 1640. L’initiative en revient à Jean de Tollenaere (1582-1643), provincial de la Flandro-Belgica (1638-1641). Trois jésuites flamands y collaborent : l’hagiographe Jean Bolland (1597-1665), Sidronus de Hossche (1596-1653) et Jacques van de Walle (1599-1690).

L’ouvrage paraît au début de l’automne 1640 chez l’imprimeur anversois Balthasar Moretus (1574-1641). Il est tiré à 1 050 exemplaires et les frais d’édition s’élèvent à 18 900 florins. C’est en fait la plus belle œuvre imprimée par cet éditeur. Elle comprend 125 emblèmes et un frontispice réalisés par le graveur anversois Cornelis Galle (1576-1650).

L’Imago est explicitement conçue comme la représentation de la province flandro-belge. Il s’agit d’un portrait de la Compagnie, brossé par l’une des plus illustres provinces. Les auteurs nous présentent l’histoire du premier siècle de l’Ordre en six parties successives : Societas nascens, Societas crescens, Societas agens, Societas patiens, Societas honorata, et Societas a Belgio accepta. À noter que la dernière section ne concerne que l’histoire de la province Flandro-Belgica et couvre presque un quart du livre. L’histoire de la Compagnie est construite selon deux perspectives : d’une part, un sens théologique où la croissance de la Compagnie est à l’image de la vie du Christ et d’autre part, un sens esthétique où le livre se parcourt comme l’image d’une architecture religieuse. Chef-d’oeuvre de l’édition baroque illustrée, œuvre chorale et collective, l’Imago primi saeculi manifeste, selon Marc Fumaroli, « une aspiration vraiment pantagruélique à tout dire […] de façon à laisser le lecteur étourdi, ébloui, frappé de stupeur et peut-être saisi d’une contagion d’enthousiasme [par] l’hyperbolisation constante des idées et des faits énumérés à la gloire de la Compagnie ». L’optique de l’Imago est de nous faire entrer dans le point de vue des cohortes d’anges qui voient et montrent l’histoire de l’Ordre depuis le ciel, dans le temps de Dieu, « comme si déjà cette glorieuse épopée providentielle était fixée et justifiée à jamais sur le grand antiphonaire du Paradis »1.

Les jésuites flamands vont également réaliser une adaptation flamande de l’Imago primi saeculi publiée chez Balthasar Moretus en 1640 à Anvers sous le titre d’Af-beeldinghe van d’eerste eeuwe der Societeyt Iesu voor ooghen ghestelt door de Duyts-Nederlantsche provincie der selver societeyt. Le format du livre a été réduit, le nombre d’emblèmes ramené à 104 et un nouveau frontispice réalisé.

L’Imago primi saeculi fut rapidement et longtemps l’objet de critique et d’attaque, en majeure partie de la part des milieux jansénistes français. Durant la Révolution française, le Parlement ordonna sa destruction. Depuis plusieurs décennies, les études à son propos se sont renouvelées et offrent une démarche plus approfondie et plus objective. Ce renouveau va de pair avec les recherches sur « l’art jésuite », les Emblemata et les Images.

L’exemplaire exposé provient de l’ancienne bibliothèque du noviciat jésuite d’Arlon. Il a été incorporé à la bibliothèque du CDRR en 19722.


Michel Hermans, s.j.



1 Marc Fumaroli, L’École du silence. Le sentiment des images au XVIIe siècle, Paris, 1994, pp. 346-347 (coll. Idées et recherches).
2 C’est le Père Joseph Schyns s.j. qui en rédige la fiche entre le 19 septembre et le 17 novembre 1972.

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