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Sous ce titre énigmatique se cache une biographie d’Ignace de Loyola. Jacques Coret, jésuite né en 1631 à Valenciennes, précise que cet ouvrage est le fruit d’un vœu fait au fondateur de la Compagnie de Jésus. Alors qu’il étudiait la théologie au collège de La Flèche, malade et condamné par les médecins, il ne se voyait pas mourir sans avoir été ordonné prêtre. Il fit entre autres vœux à saint Ignace, celui d’écrire cette hagiographie et fut guéri en « moins de quatre heures ».
Prédicateur apprécié et vulgarisateur de la dévotion aux anges gardiens, il exerça sa mission dans le nord de la France et en Belgique. De 1673 à 1680, il fut préfet de l'église des jésuites et prédicateur à Namur. La dédicace à Ignace Augustin de Grobendonck, alors évêque de Namur est un modèle du genre. Le prélat ne pourra qu’agréer le portrait de celui dont il porte le nom et voir avec satisfaction que l’administration de son diocèse, sa lutte contre les hérésies, ses vertus morales, sont comparables à celles de son saint patron.
Le titre-frontispice gravé par Richard Collin illustre le chapitre neuf de l’Apocalypse « et le cinquième ange sonna… » à partir duquel le biographe dresse le portrait d’Ignace sous la figure d’un soldat de feu. Enjambant un brasier, l’ange brandit un bouclier aux armes de la Compagnie et sonne de la trompette. L’obscurité même du livre biblique « il nous faudrait une seconde révélation pour sçavoir ce que veut dire ce disciple bien-aimé » autorise l’auteur à mettre en parallèle Ignace, fondateur d’un ordre religieux destiné à s’étendre au monde entier et le cinquième ange de l’Apocalypse, annonciateur d’une immense fournaise. L’anagramme d’Ignace de Loyola n’est-elle pas « o Ignis a deo illatus » ? [Un feu envoyé par Dieu]. Jacques Coret utilise avec aisance les codes d’une littérature métaphorique où tout est signe et brode ainsi, sur un canevas baroque et incandescent une biographie qui n’aurait pu être que pieuse et édifiante.
Jacqueline Diot