Carrés de couleur

Expériences pour servir à l'histoire de la génération des animaux et des plantes / Par M. l'abbé Spallanzani, Professeur ... Avec une ébauche de l'Histoire des êtres organisés avant leur fécondation par Jean Senebier

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Commentaire rédigé dans le cadre de la valorisation du fonds Hector Lebrun

Lazzaro Spallanzani (1729-1799) est un biologiste italien, un des premiers à réfuter la théorie de la génération spontanée, parvenant à prouver que les microbes viennent de l’air. Nombre de ses travaux s’intéressent à la reproduction animale. Dans cet ouvrage en particulier, Expériences pour servir à l’histoire de la génération des animaux et des plantes, il décrit les phénomènes de fécondation. Le savant a enfilé des petits caleçons contraceptifs à des grenouilles mâles pour empêcher leur « suc de testicules » de féconder les œufs libérés par la femelle lors de l’accouplement. Il démontre ainsi de façon expérimentale l’effet fécondateur des spermatozoïdes. Récoltant la liqueur séminale des batraciens, il réalise aussi la première fécondation in vitro. Spallanzani généralise ensuite ses expériences aux vertébrés et procède à des inséminations artificielles de chiens et, avec moins de succès, à des inséminations croisées entre espèces animales différentes. Cet essai aborde enfin la question de la reproduction des plantes et met en avant le rôle du pollen, « poussière fécondante », dans la fécondation, jusqu’alors inconnu.


Commentaire rédigé dans le cadre de l'exposition "Quand la médecine rencontre son patrimoine"

Les vedettes incontestées de ce livre de l’abbé Lazzaro Spallanzani sont nos amis les batraciens. Les grenouilles vertes aquatiques, les grenouilles des arbres, les crapauds terrestres à yeux roux et tubercules dorsaux et autres crapauds terrestres puants nous y dévoilent quelques petits secrets d’alcôves.

Au travers d’expériences inédites et âprement détaillées, Lazzaro Spallanzani cherche à percer les mystères du « suc de testicules » durant les ébats amoureux de ses chers amphibiens. Pour démontrer l’importance de la « liqueur fécondante », il conçoit, entre autres, de petits caleçons contraceptifs pour grenouille mâle empêchant ainsi le « fluide nourricier » d’animer les œufs libérés par la femelle au moment suprême de l’accouplement. Bien plus, en récoltant le précieux liquide dans lesdits caleçons, il arrive à imiter la nature au sein d’un « vase », réalisant ainsi la première fécondation in vitro.

Fort de ses expériences sur les grenouilles et désireux de généralisation, il s’intéresse aux animaux à fécondation interne et à la pollinisation de plusieurs plantes à fleurs. Il réalise, avec succès, des inséminations artificielles chez le chien et tente, avec moins de succès, l’obtention de « mulets » (des hybrides) grâce à des inséminations croisées entre espèces animales différentes.

Cette quête de l’ultime secret des amours, ô combien délicate pour l’époque, est bien vite rattrapée par de nombreuses digressions philosophique et religieuse. Les commentaires des pairs, par lettres interposées, et l’ébauche introductive par le ministre du Saint-Évangile, éclairent le texte de considérations existentielles censées étayer une des « vérités physiques » de cette fin du XVIIIe siècle : « Les fœtus des corps organisés préexistent à la fécondation, et ils préexistent dans les femelles ». L’abbé Spallanzani est, en effet, un adepte d’une théorie selon laquelle les ovules des femelles contiennent, depuis les origines, un minuscule être organisé, préformé et complet, qu’il suffit d’animer, lors de la fécondation, grâce à l’aura seminalis, l’insaisissable « vapeur spermatique ». Malgré toutes les prouesses expérimentales mises en œuvre et un sens inné de l’observation, notre cher abbé se laissera malgré tout enfermer dans ce courant de pensée et ne dévoilera aucunement l’ultime secret.

Il faudra encore patienter plus de soixante ans avant d’observer l’acte cellulaire de la fécondation chez une algue, à savoir la fusion effective de deux cellules sexuelles, mâle et femelle, qui combinent leur matériel génétique au sein d’une nouvelle cellule, la cellule-œuf. Et c’est cette union qui est à l’origine de l’extraordinaire et fulgurante métamorphose qui, cellule après cellule, donnera naissance à un être vivant organisé.


Johan Messiaen

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